L’année écoulée
semblait prometteuse pour que la société française se dote enfin d’une
législation ouvrant l’accès à une forme ou une autre de mort choisie. La
dernière campagne électorale présidentielle avait vu parmi les propositions du
candidat qui allait l’emporter se formaliser une promesse sur ce plan. Le
contexte économique difficile ayant rendu aléatoire la réalisation des
promesses le concernant, l’ambiance était prête pour que les nouvelles
autorités s’attachent avec toute leur énergie au moins aux réformes sociétales
promises. La réforme du droit du mariage avait montré à quel point cet
attachement pouvait être vital pour elles et ne devait supporter aucun
obstacle. Un rapport avait été commandé au Professeur Sicard, ancien président
du Comité Consultatif National d’Ethique à l’époque où ce comité avait émis un
avis n’excluant pas formellement la légitimité de l’euthanasie dans certaines
circonstances, en vue de clarifier les enjeux éthiques d’une prochaine
législation sur la mort choisie et de recueillir ses propositions concrètes.
Et puis une
série de grains de sable sont venus enrayer cette mécanique. Le mouvement
social d’opposition aux nouvelles règles du mariage s’est révélé plus obstiné
que prévu, laissant l’image d’une volonté politique dogmatique et indifférente
à la déstabilisation sociale engendrée par les choix dans lesquels ses
promesses l’emprisonnaient. Il montrait aussi à quel point des bouleversements
sociétaux pouvaient être vécus par certains dans la population comme des
agressions de leurs conceptions de la vie et pas simplement comme des ajustements
finalement tolérables de la vie en communauté. Et puis le rapport Sicard n’est
pas allé dans le sens attendu, rappelant son opposition à l’euthanasie et au
suicide assisté, envisageant uniquement la possibilité de rendre un mourant
inconscient avant l’heure de son décès. Même la saisine du Comité Consultatif
National d’Ethique en fonction s’est soldée par un demi-échec dans une ultime
tentative de légitimation morale de la démarche de légalisation d’une mort
choisie : tout au plus est-il fait état d’un débat au sein du comité dont
seule la règle de la majorité, et non l’unanimité, lui font rejeter tant
l’euthanasie que le suicide assisté ; de plus, la porte est laissée
ouverte dans la poursuite de la réflexion en lui faisant inclure le recours à
un débat citoyen.
En l’état actuel
de ce processus, les autorités sont donc laissées seules face à leur désir
d’aboutir à un texte de loi, munies d’un avis négatif, d’un avis refusant de
trancher, et du conseil de recourir au débat public avant de présenter un texte
annoncé pour l’automne en vue de son adoption annoncée pour l’hiver.
Dans ce contexte
général, que peut-on attendre de la poursuite de ce processus : un texte
mitigé reflétant les hésitations des avis des Sages, ou un texte volontariste
faisant entrer la société dans une nouvelle dimension de la liberté ? Les
opposants à l’euthanasie placent leurs espoirs dans la prudence des sages, et
les tenants de l’euthanasie expriment leur déception quant à cette même
prudence. Le Groupe Charon voit pourtant dans ce tableau plus de raisons de se
réjouir que de raisons de désespérer.
Redessinons le
tableau pour en mieux souligner les traits :
- une promesse
de campagne,
- un sujet sur
lequel il est possible de faire preuve de volontarisme sans la contrainte extérieure
de la situation économique,
- la quasi
absence d’autre sujet permettant ce volontarisme,
- un avis
négatif d’un ancien sage, tempéré par un avis émis par des sages en fonction
refusant de se prononcer et évacuant la question sur le débat public,
- une préparation
du corps social déjà effectuée à l’occasion de la réforme du mariage à accepter
un changement sociétal, traduisant la loi psychologique simple du premier pas
voulant qu’une seconde couleuvre est toujours plus aisée à avaler que la
première,
- un argumentaire
déjà rodé avec en point d’orgue le fait que l’apport d’une nouvelle liberté
réglementaire ne retire aucune liberté à ceux qui ne souhaitent pas l’utiliser,
- une opinion
publique évidemment acquise au fait d’abréger des souffrances plutôt que de les
laisser durer,
- la simplicité
de la solution proposée face à la complexité imaginée d’accompagner une fin de
vie en lui conservant du sens,
- un agenda
programmé et des décisions promises à échéances déjà annoncées.
Que faudrait-il
de plus pour se réjouir ? Le débat citoyen annoncé pour l’automne est à l’évidence
dans ce contexte un artifice destiné à entériner une décision qui ne fait aucun
doute. Comme ne fait aucun doute le texte qui sera présenté au bout du compte
tant, comme l’examen des textes antérieurs auquel procédait notre billet du 23
Juin 2012 le mettait en évidence, le même texte à peine remanié fait l’objet
depuis des années de toutes les propositions de loi sur le sujet. Sans doute y
aura-t-il effacement diplomatique du terme euthanasie pour centrer le texte sur
le suicide assisté mieux toléré, à moins que les deux formulations ne soient
mises de côté pour leur préférer un terme plus englobant sur le modèle proposé
par le Groupe Charon de « mort choisie ». Sans doute les difficultés
que nous signalions dans notre billet du 30 Juin 2012 quant au financement du
dispositif par une taxe sur les tabacs en feront-elles disparaitre la
disposition. Mais il ne pourra s’agir que de variations à la marge d’un texte
déjà structuré.
C’est de cette
analyse que le Groupe Charon tire sa totale confiance en une émancipation
inéluctable et proche tant des libertés individuelles que des libertés entrepreneuriales
qui pourront enfin lui permettre d’offrir les prestations euthanasiques les
plus complètes et les plus adaptées aux exigences de qualité auxquelles chacun peut
légitimement prétendre. Certain de la nécessité de la rencontre historique de
ces deux mouvements de liberté, le Groupe Charon se prépare dès maintenant à
prendre toute sa part à la Fête du Mourir dont il appelle de ses vœux l’organisation
sur la place de la Bastille au lendemain de la ratification de cette
législation nouvelle. Il rappelle s’il en était besoin qu’il met à disposition
de chacun, et à un tarif privilégié qui sera à la hauteur de l’importance de l’évènement,
aussi bien le drapeau que l’hymne qu’il avait présenté dans ses billets du 25
Avril 2012. Il proposera de plus une grille tarifaire promotionnelle exceptionnelle
sur tout son catalogue durant une période de deux mois suivant la promulgation
de la loi. Il proposera également, en complément de son catalogue, et dans la même
période, une prestation exceptionnelle collector « Fête de la Bastille »
pour une euthanasie réellement inoubliable.
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